Écrire des lettres d'amour à Partenamut constitue un plaisir coupable dont je ne me priverais pour rien au monde. Car qu'est ce que Partenamut finalement, sinon notre Mère à tous ?
N'oublie jamais que tu lui dois tes dents alignées et le redressement de tes pieds plats par exemple. A 30 ans, Partenamut est le sponsor fidèle et inébranlable de tes rdv psy et de ton micro-osthéopate, celle qui te permet de faire un test d'audition gratos alors que le premier stress d'un port de casque prolongé te ronge les sangs. Partenamut, une mère, donc, certes sans visage, mais aux mille petites mains qui s'activent pour te rendre le soin aussi facile et accessible qu'une pizza Picard. Parfois je leur passe un coup de fil, juste pour le plaisir de m'entretenir avec des gens charmants et empathiques, prêts à venir combler un léger vide affectif. La semaine dernière j'ai ainsi eu une longue et délicieuse conversation avec Monsieur Christophe M. Nous avons discuté de l'état politique du monde, nous avons réalisé un comparatif des meilleures chaises pour le télétravail puis conclu sur les avantages d'avoir un petit Delhaize au coin de sa rue. Christophe et moi avons raccroché bons amis avec la promesse de boire à la santé l'un de l'autre.
Pourtant, rien ne peut remplacer ma joie d'écrire à Partenamut, pas même Christophe M... Écrire à Partenamut, c'est un peu comme fumer un petit joint seul le dimanche soir. d'abord, il faut coller une étiquette dans le carré dévolu à cette fonction, sans dépasser les pointillés, frisson nostalgique de tes années de maternelles. Choisir entre un timbre roi Philippe ou un timbre grosse myrtille, écrire l'adresse au feutre de couleur. C'est tout le charme désuet d'une correspondance administrative que j'aime charger de mots doux et d'enveloppes richement enluminées, espérant ainsi secrètement passer devant mon voisin dans la liste des remboursements d'urgence à effectuer. Il est possible que je sois fichée chez Partenamut comme un cas névrotique à surveiller. Mais je m'en calle, la vie est trop courte pour songer que cette forme d'attachement pour sa mutualité est une déviance contemporaine de plus dans le paysage déjà bien chargé de nos maladies mentales. Et puis, certains parlent bien à leur GPS, je l'ai entendu à la radio.
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